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Les jeunes Canadiens s’épuisent au travail et le stress contribue à une épidémie nationale de santé mentale qui coûte au pays plus de 200 milliard de dollars par an. Les entreprises ont la possibilité, voire l’obligation, de s’attaquer à cette crise en créant des cultures d’entreprise qui favorisent le bien-être mental comme facteur clé de performance, avec des systèmes intégrés qui permettent de façon proactive aux employés de prospérer.

Résumé

Un quart des Canadiens ont signalé des symptômes de troubles de santé mentale en 2021, 5 millions ont déclaré avoir besoin d’aide pour leur santé mentale et plus d’un tiers (35 %) se disent épuisés.

Cette crise a un impact disproportionné sur les jeunes. Environ 40 % des travailleurs canadiens âgés de 18 à 24 ans se trouvent à un « point de rupture » en matière de santé mentale. À l’âge de 40 ans, la moitié d’entre eux auront souffert d’une forme quelconque de maladie mentale.

Le travail est la principale source de stress pour les Canadiens. Mais bien que la plupart des organisations se soucient grandement de la santé et du bien-être de leurs employés, beaucoup ont été lents à reconnaître l’étendue de la crise. L’absence de stratégie, le manque de soutien et la stigmatisation de la santé mentale ont créé des cultures d’entreprise où les jeunes et leurs responsables se sentent découragés de parler de ces problèmes.

Mais une étude du Boston Consulting Group (BCG) montre que le travail vaut la peine d’être réparé. Notre étude révèle qu’investir dans la santé mentale et le bien-être peut créer un cercle vertueux, en générant des bénéfices massifs pour les Canadiens, les entreprises canadiennes et l’économie dans son ensemble. Grâce à des entrevues, des sondages et des groupes de discussion, nous avons appris que :

Des lieux de travail plus sains attirent les talents clés : Avec des taux de chômage à des niveaux historiquement bas, le Canada dépend de plus en plus des jeunes travailleurs. Mais pour les attirer, il faut changer les cultures organisationnelles. Deux fois plus de travailleurs de la génération millénaire et de la génération Z que les baby-boomers affirment vouloir une culture d’entreprise qui priorise la santé mentale et le bien-être, ce qui signifie que les organisations qui sont à l’avant-garde dans ces domaines auront l’avantage d’attirer les meilleurs talents.

  • Les travailleurs engagés sont nettement plus productifs : Au Canada, les travailleurs dont le bien-être mental est faible manquent en moyenne cinq jours de travail par an et font le strict minimum pendant 37 autres jours. Les entreprises qui prennent des mesures pour favoriser le bien-être de leurs employés ont vu leur productivité s’améliorer de 13 % en moyenne.
  • Une productivité accrue entraîne une plus grande prospérité nationale : Une augmentation moyenne de 13 % des taux de productivité aurait un impact important et positif sur la croissance économique du pays : le produit intérieur brut passerait de 108 000 dollars par employé aujourd’hui à 122 000 dollars, et le bénéfice moyen par employé pour les entreprises canadiennes passerait de 21 000 dollars à 24 000 dollars.

Le bien-être au travail est un moteur de croissance, mais les entreprises devront modifier leurs pratiques et leur culture pour la mettre en œuvre. Les entreprises que nous avons interrogées et affichant le meilleur rendement ont un objectif commun: devenir l’organisation à laquelle tout le monde veut se joindre. Voici les étapes à suivre pour commencer ce parcours.

  • Faire de la santé mentale et du bien-être une priorité stratégique de l’entreprise : Pour que le bien-être au travail s’améliore considérablement, les dirigeants doivent aborder le sujet de la même manière qu’ils le font pour toute occasion concurrentielle majeure, soit en établissant une vision, en définissant des objectifs et en créant un plan d’affaires. Les hauts dirigeants doivent être visiblement et activement impliqués, et l’équipe de planification doit également inclure des minorités visibles et des membres de la communauté LGBTQ+.
  • Développer des leaders génératifs : Grâce à l’encadrement, aux cours et aux simulations, les cadres peuvent apprendre des façons efficaces de fournir une rétroaction constructive et de s’assurer que tous les travailleurs, en particulier les plus jeunes, se sentent vus, entendus et valorisés. Dans le cadre de cet effort, les dirigeants doivent également élaborer des plans d’action individualisés comportant des engagements clairs et observables qu’ils partageront avec leurs pairs et leurs équipes. Les engagements publics permettent de s’assurer que les dirigeants se sentent personnellement responsables de modéliser le comportement que nous voulons voir plus largement dans l’organisation.
  • Renforcer la résilience des employés : La formation sur la résilience devrait commencer dès le début du mandat d’un(e) employé(e), car les recherches montrent que les habitudes de travail s’ancrent au cours des cinq premières années de la carrière. L’un des moyens les plus efficaces de partager l’apprentissage est de raconter des histoires et de créer des occasions pour les dirigeants et les cadres de partager des moments où ils ont rencontré des difficultés et comment ils ont surmonté ces défis. Les organisations qui affichent un haut rendement investissent également dans des ressources autodirigées que les employés peuvent utiliser à leur propre rythme et selon leur emploi du temps. Il peut s’agir d’applications de pleine conscience, d’espaces physiques où les employés peuvent se déconnecter du travail, de cours de santé et de programmes basés sur des activités.
  • Fournir un soutien structuré : Il est essentiel de rendre les interventions cruciales facilement accessibles. La création de sites Web ou d’applications regroupant les ressources disponibles en un seul endroit, facile à parcourir, peut contribuer à améliorer la connaissance et l’utilisation des programmes existants sur le lieu de travail. Il est également important de disposer de conseillers d’orientation professionnelle externes sur lesquels les jeunes travailleurs peuvent s’appuyer et d’un réseau de services médicaux externes auxquels les employés peuvent accéder. Enfin, les organisations doivent créer des supports de politique d’entreprise qui aident les gestionnaires et les RH à comprendre comment avoir des conversations productives avec les employés. Ces conseils peuvent les aider à gérer les zones d’ombre et à comprendre quand les ressources externes peuvent être les plus utiles.

C’est le moment d’agir. Changer les cultures d’entreprise est un parcours que les organisations doivent commencer aujourd’hui. Le BCG s’est engagé à faire ce même voyage. Nous pensons que le bien-être peut ouvrir une source de croissance, en améliorant la qualité de vie des Canadiens, en augmentant la productivité et la compétitivité des entreprises canadiennes, et en aidant à attirer et à retenir la prochaine génération de talents canadiens.

Nous avons élaboré ce rapport dans l’espoir de susciter le dialogue et nous nous réjouissons de poursuivre la discussion avec vous.

Introduction

Les jeunes Canadiens s’épuisent au travail et le stress non maîtrisé contribue à une épidémie nationale de santé mentale.

Un quart des Canadiens ont déclaré souffrir d’une forme quelconque de maladie mentale en 2021, et 5 millions ont dit avoir besoin d’aide pour gérer ces besoins, ce qui fait de la maladie mentale la principale cause d’invalidité au pays.

Les jeunes sont touchés de façon disproportionnée. Nouvellement arrivés sur le marché du travail et ébranlés par des années de bouleversements liés à la pandémie, pas moins de 40 % des travailleurs âgés de 18 à 24 ans déclarent avoir atteint un « point de rupture » en matière de santé mentale. Au rythme actuel, près d’un Canadien sur deux souffrira d’une maladie mentale avant l’âge de 40 ans. Cependant, le manque d’attention de la part des organisations et la stigmatisation qui entoure le débat sur la santé mentale font que ces problèmes restent largement occultés et ne sont pas abordés.

Outre le bilan humain stupéfiant, le déclin de la santé mentale a également un impact économique important. Une étude menée par le Boston Consulting Group révèle que les coûts directs et indirects au Canada dépassent les 200 milliards de dollars par an.

Bien que le travail puisse être une source clé de stress, il peut également être à l’origine du rétablissement du Canada. L’analyse du BCG montre que l’évolution des cultures et des pratiques sur le lieu de travail pour favoriser le bien-être peut ouvrir une source de croissance, en améliorant la qualité de vie des Canadiens, en augmentant la productivité et la compétitivité des entreprises canadiennes et en aidant à attirer et à retenir la prochaine génération de talents canadiens.

Le présent document examine les domaines dans lesquels la santé au travail se dégrade et ce que les organisations peuvent faire pour transformer le bien-être en source de croissance.

Le Canada connaît une crise de la santé mentale

À la fin de 2022, le BCG a interrogé plus de 1 300 jeunes travailleurs canadiens et a mené plus de 30 entretiens avec des employés, des cadres, des dirigeants et des experts sur le terrain pour savoir comment leur lieu de travail contribuait à leur bien-être mental.

Ce que nous avons appris est troublant. Chaque année, 20 % des Canadiens sont confrontés à une forme ou une autre de problème de santé mentale. La pandémie a été un facteur aggravant, mais le nombre de Canadiens qui disent être aux prises avec des problèmes de santé mentale a augmenté même avant la crise de la COVID-19, augmentant de plus de 13 % par année depuis 2016.

Le travail est l’un des principaux facteurs de détérioration du bien-être. Plus de 25 % des Canadiens déclarent que le travail est leur principale source de stress et 35 % se disent épuisés.

Les jeunes sont particulièrement vulnérables. En 2022, 50 % des jeunes professionnels ont déclaré avoir besoin d’aide pour un problème émotionnel ou mental. L’une des raisons est la pandémie, qui a perturbé les processus normaux d’établissement de relations et d’apprentissage. Une autre raison est le manque d’attention accordée à l’aide apportée aux nouvelles recrues pour qu’elles établissent des liens significatifs lorsqu’elles commencent un nouvel emploi. En l’absence de pratiques permettant d’établir des relations, de donner un sens et un but à l’intégration, les jeunes employés peuvent se sentir isolés et à la dérive. Environ 20 % des nouveaux arrivants sur le marché du travail déclarent que la transition vers le marché du travail a eu un effet négatif sur leur bien-être mental. Un troisième problème concerne les perceptions régressives à l’égard de la génération Z, à savoir que cette génération « a besoin d’être dorlotée » et « manque d’ambition ». Ces préjugés négatifs persistent malgré le fait que les données les réfutent systématiquement, et ils font du lieu de travail une cause plus importante de stress pour les jeunes travailleurs.

Les Canadiens noirs et autochtones sont également confrontés à des facteurs de stress particuliers : 55 % des travailleurs noirs déclarent ne pas se sentir à l’abri de la discrimination sur leur lieu de travail et 40 % des travailleurs autochtones disent avoir été victimes de préjugés en raison de leur identité.

Le coût économique total de la prise en charge de la santé mentale et des handicaps dépasse les 220 milliards de dollars par an. Les coûts directs, y compris les dépenses du secteur public, représentent près de 10 % des dépenses totales de santé publique, soit 32 milliards de dollars. Les coûts indirects, y compris le temps d’arrêt des travailleurs et le présentéisme, sont estimés 190 milliards de dollars, auxquels s’ajoutent d’autres coûts cachés liés à la réduction de la qualité de vie de la famille, des amis et des proches.

Heureusement, il existe des moyens d’atténuer cette crise, et les entreprises canadiennes peuvent jouer un rôle de premier plan à cet égard.

Le bien-être au travail est un facteur de croissance

Nos recherches montrent que l’investissement dans la santé mentale et le bien-être peut créer un cercle vertueux, générant des bénéfices considérables pour les Canadiens, les entreprises canadiennes et l’économie dans son ensemble.

Voici quelques-unes des façons dont une meilleure santé au travail produit un retour sur investissement considérable.

  • Meilleure rétention et développement des talents essentiels : Avec des taux de chômage à des niveaux historiquement bas, le Canada dépend de plus en plus des jeunes travailleurs, et une pénurie de talents affecte déjà un tiers des entreprises canadiennes. (Voir Annexe 2.) Pour attirer les jeunes travailleurs dont ils ont besoin pour remplacer les retraités de la génération du baby boom, les entreprises canadiennes doivent changer non seulement leurs méthodes de recrutement, mais aussi leurs méthodes d’organisation. Le bien-être est devenu un critère de sélection essentiel. Deux fois plus de travailleurs de la génération millénaire et de la génération Z que de celle du baby boom affirment vouloir une culture d’entreprise qui accorde la priorité à la santé mentale et au bien-être.

  • Amélioration de la productivité : Il existe une forte corrélation entre le bien-être et la productivité. Au Canada, les travailleurs dont le bien-être mental est faible manquent en moyenne cinq jours de travail par an et font le strict minimum pendant 37 autres jours. La productivité du Canada étant déjà inférieure à celle des États-Unis (environ 83 000 dollars par travailleur au Canada contre 130 000 dollars aux États-Unis), le Canada ne peut pas se permettre d’ignorer ce problème. Il est encourageant de constater que les entreprises qui prennent des mesures pour favoriser le bien-être de leurs employés ont vu leur productivité s’améliorer de 13 % en moyenne. (Voir Annexe 3.)
  • Amélioration de la prospérité nationale : En termes économiques, une hausse moyenne de 13 % des taux de productivité aurait un impact significatif et positif sur la croissance économique du pays, faisant passer le produit intérieur brut de 108 000 dollars par employé aujourd’hui à 122 000 dollars. Cela pourrait également faire passer le bénéfice moyen par employé des entreprises canadiennes de 21 000 à 24 000 dollars.

Toutefois, pour que le Canada puisse récolter ces bénéfices, les dirigeants doivent comprendre les facteurs qui contribuent à réduire le bien-être au travail.

Pourquoi les lieux de travail sont-ils si stressants?

La plupart des organisations souhaitent créer des cultures d’entreprise dynamiques et inclusives où les individus peuvent s’épanouir. La plupart reconnaissent également les problèmes très réels liés à l’épuisement professionnel et à la pression à long terme que subissent de nombreux employés depuis le début de la pandémie.

Cependant, le modèle d’entreprise traditionnel sépare largement le travail de la vie privée, et les questions de santé mentale sont encore plus éloignées. Cette orientation crée une culture qui décourage les travailleurs de parler du stress. Et c’est particulièrement le cas pour les travailleurs plus jeunes, qui prennent exemple sur leur entourage.

Grâce à des sondages, des groupes de discussion et des entrevues, le BCG a identifié quatre facteurs contribuant à l’affaiblissement de la santé mentale et du bien-être sur le lieu de travail.

  • La santé et le bien-être sont considérés comme secondaires par rapport au rendement financier : Alors que la plupart des organisations se soucient de leurs employés, les structures d’incitation et la planification d’entreprise se sont traditionnellement concentrées sur le rendement financier. Les questions de santé et de bien-être sont souvent considérées comme des questions accessoires et moins importantes d’un point de vue stratégique que les réalités « dures » du rendement financier. Au-delà de la prise de conscience qu’un lieu de travail sain est un lieu de travail heureux, les implications stratégiques et concurrentielles plus larges des taux élevés d’épuisement professionnel et de stress sur le rendement de l’organisation sont généralement peu connues, et relativement peu d’organisations fixent des incitatifs et des objectifs à court terme en ce qui concerne le rendement en matière de bien-être.

    Ces attitudes éclairent la culture du lieu de travail, ce qui donne l’impression que les dirigeants accordent la priorité à la santé des résultats nets au détriment du bien-être général des employés. Un superviseur des opérations d’un détaillant en ligne a déclaré : « Je veux donner la priorité au bien-être de mes employés. Mais ce qui compte pour ma promotion, ce sont les ventes et les marges. Si mon personnel est en mesure d’obtenir des résultats, alors tout va bien. »

  • Les gestionnaires ne savent pas comment parler de santé mentale ou même s’ils devraient le faire : L’un des obstacles les plus courants à l’accès au soutien en matière de santé mentale et de bien-être est la gêne ressentie lorsqu’il s’agit d’en exprimer le besoin. Les gestionnaires ont souvent peu d’indications sur la manière d’aborder les questions de santé mentale avec leurs subordonnés et peuvent avoir l’impression que ces sujets ne relèvent pas de leur domaine de compétence.

    Et bien que les organisations puissent suivre les mesures de santé mentale et de bien-être, les résultats se limitent souvent aux dirigeants. En conséquence, la santé mentale peut être perçue comme un problème caché, et les dirigeants, dont certains peuvent également être en difficulté, peuvent ne pas avoir une idée précise de l’état du bien-être sur leur lieu de travail. Le directeur d’une école secondaire de l’Ontario a déclaré : « Je ne reçois aucune mesure ni aucun indicateur de rendement clé. Nous avons de la chance si l’équipe centrale nous propose un développement professionnel ne serait-ce qu’une fois par année civile. »

    Le manque de transparence peut renforcer l’idée que la santé mentale et le bien-être ne sont pas une priorité. Peu d’employés, en particulier les plus jeunes, voudront s’épancher sur des sujets sensibles qui pourraient suggérer un manque d’aptitude à leur travail, et sans l’encouragement de leurs supérieurs, la plupart ne le font pas. Un ancien stagiaire d’une grande banque canadienne a déclaré : « Je ne dirai jamais à mon employeur que je suis anxieux ou inquiet parce qu’il pourrait me percevoir comme quelqu’un qui ne sait pas bien gérer la pression ».

  • Peu de conscience que la santé et le bien-être mental sont des compétences professionnelles : Peu de gens contesteraient que la capacité à rebondir dans l’adversité est utile, mais dans de nombreuses entreprises, ce trait de caractère est considéré comme inné alors qu’il s’agit en fait d’une qualité apprise. Le conditionnement social et la formation à la gestion efficace des revers sont essentiels pour cultiver l’état d’esprit de croissance associé à la résilience mentale. Pourtant, notre étude a révélé que 61 % des employés ne reçoivent pas de conseils sur la manière de gérer le stress professionnel et que 65 % d’entre eux n’ont pas accès à des programmes de prévention de l’épuisement professionnel.

    Les jeunes travailleurs sont ceux qui ont le plus besoin d’une telle formation, car ils ont eu moins de temps dans leur carrière et moins d’expérience pour faire face aux défis liés à leur travail. Bien que de nombreuses entreprises parrainent des programmes de santé sur le lieu de travail et pour les employés, ces initiatives sont souvent intégrées dans des efforts plus vastes à l’échelle de l’entreprise, tels que la diversité, l’équité et l’inclusion. Les fonctions de soutien sont souvent chargées de gérer ces programmes. Mais cela peut renforcer l’idée que les questions de santé mentale et de bien-être sont secondaires par rapport à l’activité principale de l’entreprise et donner aux enquêtes et aux formations connexes connexe l’impression d’un exercice de vérification.

  • Des systèmes de soutien inadéquats : Notre étude révèle une demande importante de services de santé mentale et de bien-être : 44 % des employés interrogés ont déclaré avoir cherché à obtenir ce type de soutien en 2022. Mais le manque de clarté quant aux ressources disponibles et l’insatisfaction quant à la qualité des services fournis sont des thèmes communs. 80% des personnes interrogées ont déclaré avoir eu des difficultés à accéder aux ressources en matière de santé mentale, et 50 % ont été déçues par la qualité des services fournis. Un jeune diplômé et nouvel enseignant a déclaré : « Je ne sais pas vers qui me tourner et cela crée beaucoup d’anxiété parce que je veux juste faire du bon travail. »

    Le caractère abordable des soins est une autre source d’inquiétude, tout comme le manque de temps pour les recevoir correctement. Un jeune enseignant nous a confié : « Tout ce qui est autogéré ou un programme éducatif est souvent perçu comme une étape supplémentaire que quelqu’un doit franchir pour en bénéficier. J’ai l’impression que cela me fait faire plus de travail, alors que c’est la charge de travail qui me stresse ». Même lorsque des ressources internes efficaces sont disponibles, l’adoption peut encore être faible, en raison de la stigmatisation qui leur est attachée.

Ces défis sont complexes. Cependant, nos recherches montrent qu’il est possible de les relever et de créer un cercle vertueux qui favorise la croissance personnelle, professionnelle et commerciale, une victoire pour les Canadiens et les entreprises canadiennes.

Devenir l’organisation à laquelle tout le monde veut adhérer

En prenant les devants en matière de santé mentale et de bien-être, les entreprises peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel, ce qui les rend plus attrayantes pour les talents clés et leur permet d’augmenter considérablement leur taux de rétention et leur productivité.

Voici les mesures que les entreprises doivent prendre pour entamer ce parcours.

  • Faire de la santé mentale et du bien-être une priorité stratégique de l’entreprise : Pour que le bien-être au travail s’améliore considérablement, les dirigeants doivent aborder le sujet de la même manière qu’ils le font pour toute occasion concurrentielle majeure, soit en établissant une vision, en définissant des objectifs et en créant un plan d’affaires. Pour recruter et retenir les jeunes travailleurs dont les entreprises canadiennes ont besoin pour leur réussite future, il faudra repenser en profondeur la planification et le développement de carrière. Les jeunes talents ne sont pas moins ambitieux que leurs aînés, mais nombre d’entre eux ne se contentent pas de gravir un « échelon » prédéfini. Ils recherchent plutôt des carrières qui leur permettront et leur donneront les moyens d’utiliser leurs compétences distinctes, en façonnant des rôles et des responsabilités qui exploitent au mieux leur talent dans l’intérêt de l’organisation et de ses clients.

    Lors de l’élaboration de la stratégie, les hauts dirigeants doivent être visiblement et activement impliqués, depuis la définition de l’orientation jusqu’à la communication du lancement officiel, et l’équipe de planificatio pour s’assurer que la stratégie reflète les besoins et le contexte particuliers des minorités visibles et des membres de la communauté LGBTQ+

    Une fois la stratégie définie, les entreprises affichant le plus haut rendement lui donnent du mordant en créant des indicateurs clés de rendement qui permettent de suivre les progrès accomplis et en intégrant la responsabilité de la réalisation de certains objectifs dans les évaluations de la direction. Pour obtenir une vue d’ensemble, il est essentiel de disposer à la fois de données relatives aux employés, telles que les enquêtes et les contrôles permanents, et de données relatives au système, telles que l’évolution des demandes d’invalidité de courte durée, les taux d’attrition et la répartition des jours de congé.

    Bien gérés, les résultats peuvent être extraordinaires. Bell a créé une stratégie holistique en matière de santé mentale appelée « Parlons-en » pour faire face à une hausse des demandes d’indemnisation pour invalidité de courte durée liées à un déclin du bien-être mental. Depuis son lancement, cette stratégie a permis de réduire de 20 % les demandes d’invalidité de courte durée liées à la santé mentale et de 50 % les taux de récidive. Pour chaque dollar investi par Bell dans des programmes de santé mentale sur le lieu de travail, l’entreprise a gagné 4,10 $.

  • Développer des leaders génératifs : Le leadership génératif est une approche humaniste qui permet d’obtenir des équipes très motivées et de créer une culture de sécurité psychologique. Ce modèle de leadership met l’accent sur une communication ouverte et fondée sur les faits, sur une connexion authentique, sur l’apprentissage partagé et sur la responsabilité. Cliquez ici pour obtenir plus d’informations sur le leadership génératif.

    Grâce à l’encadrement, aux cours et aux simulations, les dirigeants peuvent apprendre des façons efficaces de motiver les employés, fournir des commentaires constructifs et veiller à ce que tous les travailleurs, en particulier les plus jeunes, se sentent vus, entendus et valorisés. Les dirigeants doivent également élaborer des plans d’action individualisés comportant des engagements spécifiques et observables qu’ils partageront avec leurs pairs et/ou leurs équipes. Les engagements publics permettent de s’assurer que les dirigeants se sentent personnellement responsables de modéliser le comportement que nous voulons voir plus largement dans l’organisation. Chez Google, par exemple, les gestionnaires qui reçoivent les meilleurs commentaires de leurs subordonnés deviennent des mentors pour d’autres gestionnaires, ce qui crée un effet de cascade. Les cadres dont les résultats sont moins positifs bénéficient d’un accompagnement et d’un soutien approfondis.

    Les pratiques de travail peuvent également être génératives. Les organisations de premier plan déploient de plus en plus d’équipes agiles basées sur des projets. Cette structure permet non seulement de stimuler la productivité, mais aussi d’établir des liens et de créer un sentiment de mission et d’objectif communs, des attributs qui sont particulièrement précieux pour les jeunes employés.

  • Renforcer la résilience des employés : Les dirigeants doivent investir dans des structures qui permettent aux employés de gérer eux-mêmes les facteurs de stress. Il peut s’agir d’outils autogérés tels que des applications de pleine conscience auxquelles les travailleurs peuvent accéder à leur convenance. Il peut également s’agir de ressources sur place, comme des espaces physiques où les employés peuvent se déconnecter du travail. Les journées de bénévolat, les cours de santé physique et les programmes axés sur les activités sont d’autres moyens pour les entreprises et les organisations de faire de la place aux jeunes travailleurs pour qu’ils se connectent avec leurs collègues et leurs gestionnaires.

    En outre, les employeurs peuvent aider leurs employés à développer leur propre bien-être mental. La capacité à surmonter les revers dans la vie professionnelle est un muscle qui peut être entraîné et renforcé, comme beaucoup d’autres compétences professionnelles. L’un des meilleurs moyens d’encourager ce type de réflexion est que les dirigeants partagent leurs histoires personnelles sur les revers qu’ils ont rencontrés, la manière dont ils ont surmonté les périodes les plus difficiles de leur carrière et les personnes sur lesquelles ils se sont appuyés pour les soutenir, ce qui normalise les obstacles rencontrés en cours de route. Pour réduire l’épuisement professionnel au BCG, par exemple, chaque équipe se rencontre pour s’aligner sur les normes de travail et élaborer des stratégies de dépannage au début de tout nouveau projet. Ces réunions, dirigées par un animateur, permettent aux membres de l’équipe d’exprimer leurs besoins et de réfléchir à des solutions, afin de les aider à maintenir un environnement de travail sain mentalement.

    Nous encourageons la formation à la résilience à commencer dès le début du mandat d’un employé, lors de l’intégration, car cette période est particulièrement stressante pour les jeunes travailleurs qui font leurs premiers pas dans la vie professionnelle. Nos recherches montrent que de nombreuses habitudes professionnelles s’ancrent au cours des cinq premières années de la carrière, de sorte que l’apprentissage précoce de stratégies efficaces pour gérer les problèmes liés à la vie professionnelle et à la vie privée peut s’avérer payant à long terme.

  • Fournir un accès à un soutien structuré : Il est essentiel de rendre les interventions cruciales facilement accessibles. Les jeunes travailleurs sont susceptibles de se tourner d’abord vers les outils numériques. La création de sites Web ou d’applications regroupant les ressources disponibles en un seul endroit, facile à parcourir, peut contribuer à améliorer la connaissance et l’utilisation des programmes existants sur le lieu de travail. Par exemple, Sobeys a lancé un site Web public qui sert de guichet unique pour toutes les ressources en matière de santé mentale et de bien-être, y compris l’orientation professionnelle et les conseils sur la façon d’accéder à des psychologues par le biais du régime d’avantages sociaux collectif.

    Il est également essentiel de mettre les travailleurs en contact avec des ressources professionnelles de qualité. Les jeunes travailleurs peuvent vouloir éviter certaines discussions sur le lieu de travail, qu’elles soient liées à la santé mentale ou à la carrière. Les dirigeants peuvent déstigmatiser ce type d’engagement en communiquant sur la valeur qui peut en être tirée, en permettant un accès confidentiel et en accordant des congés protégés aux employés qui le souhaitent. Conformément aux recommandations de la Société canadienne de psychologie, les organisations devraient fournir une couverture d’au moins 3 500 dollars par an.

    Enfin, les organisations doivent créer des supports de politique d’entreprise qui aident les gestionnaires et les RH à comprendre comment avoir des conversations productives avec les employés. Ces conseils peuvent les aider à gérer les zones d’ombre et à comprendre quand les ressources externes peuvent être les plus utiles.



Le bien-être n’est pas le fruit du hasard. C’est un sous-produit du changement culturel. Les entreprises canadiennes peuvent jouer un rôle important dans l’atténuation des problèmes de santé mentale qui touchent les travailleurs du pays. L’avenir est entre nos mains. Mettons-nous au travail.

Remerciements

Les auteurs souhaitent remercier les conseillers et collègues suivants pour leur précieuse contribution à l’élaboration de cet article : Joseph Sexsmith, Bill Howatt, Josh Hellyer, Eric Windeler, Tanya Halsall, Nina Abdelmessih, Charlotte MacDonald, Alexandre Torres, Zubby Achara, Lauryn Murphy, Colan Wang et Heather Lau.